Notre reve chez Charles Baudelaire
Connais-tu, tel moi, la douleur savoureuse, Et de toi fais-tu dire: «Oh! l’homme singulier!» —J’allais mourir. C’etait au sein d’ mon ame amoureuse, Desir mele d’horreur, un mal particulier;
Angoisse et vif espoir, sans humeur factieuse. Plus allait se vidant le fatal sablier, Plus ma torture etait apre et delicieuse; Tout mon c?ur s’arrachait au monde familier.
J’etais comme l’enfant avide du spectacle, Haissant le rideau tel on deteste un obstacle. Enfin la verite froide se revela:
J’etais fond sans surprise, et J’ai terrible aurore M’enveloppait. —Eh quoi! n’est-ce donc que i§a? Internet etait levee et j’attendais encore.
France 1861 Genre de post Poesie Contexte L’atmosphere onirique reste marquee par la brusque entree en matiere, l’image du sablier et la mention de l’aurore coincidant avec le retour en conscience et Notre reflexion application fcn chat dans le reve.Selon Antoine Adam, ce sonnet pourrait etre inspire d’un reve personnel, a moins que Baudelaire n’explore ici un theme deja traite via Auguste Dozon, poete de l’Ecole normande, en 1843. Texte temoin Mes fleurs de la peine, avec introduction, variantes et notes par A. Adam, Paris, Garnier, 1961.
Ces deux parties de les lectures de loisir, ayant souvent fourni matiere a faire mes reflexions, fournissaient maintenant une pature a mes reves.
Il m’est arrive souvent de voir, pendant que j’etais eveille, une sorte de repetition de theatre, se peignant plus tard i propos des tenebres complaisantes, – une foule de dames, – peut-etre une fete et des danses. Et j’entendais qu’on disait, ou je me disais a moi aussi: «Ce sont les femmes et les filles de ceux qui s’assemblaient dans la paix, qui s’asseyaient a toutes les memes tables, et qui etaient allies par le mariage ou via le sang; et malgre tout, avec un certain jour d’aout 1642, ils ne se paraissent plus jamais souri et ne se paraissent desormais rencontres que i propos des champs de bataille; et a Marston-Moor, a Newbury ou a Naseby, ils ont tranche tous les liens de l’amour avec le sabre cruel, ainsi, ils ont efface avec le sang le souvenir des amities anciennes.» Les dames dansaient, et elles semblaient aussi seduisantes qu’a la cour de George IV. Cependant je savais, meme au sein d’ mon reve, qu’elles etaient au tombeau depuis pres de deux siecles. Neanmoins, toute cette pompe devait se dissoudre soudainement; a un claquement de mains, se faisaient entendre ces mots dont le le me remuait le coeur : Consul Romanus! et immediatement arrivait, balayant bien devant lui, magnifique dans son manteau de campagne, Paul-Emile ou Marius, entoure de la compagnie de centurions, faisant hisser la tunique rouge au bout d’une lance, et suivi de l’effrayant hourra des legions romaines. D’etonnantes et monstrueuses architectures se dressaient dans son cerveau, semblables a ces constructions mouvantes que l’oeil du poete apercoit en nuages colores via le soleil couchant. Mais bientot a ces reves de terrasses, de tours, de remparts, montant a des hauteurs inconnues et s’enfoncant dans d’immenses profondeurs, succederent des lacs ainsi que vastes etendues d’eau. L’eau devint l’element obsedant. Nous avons deja note, dans notre bricolage sur le haschisch, cette etonnante predilection du cerveau Afin de l’element liquide et pour ses mysterieuses seductions. Ne dirait-on jamais qu’il y a une singuliere parente entre ces deux excitants, du moins dans leurs effets sur l’imagination, ou, si l’on prefere votre explication, que le cerveau humain, sous l’empire tout d’un excitant, s’eprend plus volontiers des images? Les eaux changerent bientot de caractere, ainsi, les lacs transparents, brillants comme des miroirs, devinrent des mers et des oceans. Et puis une metamorphose nouvelle fit de ces eaux magnifiques, inquietantes seulement avec leur frequence et par un etendue, 1 affreux tourment. Notre auteur avait trop aime la foule, s’etait trop delicieusement plonge en mers de la multitude, pour que la face humaine ne prit nullement dans ses reves une part despotique. Et alors se manifesta ce qu’il a deja appele, je crois, «la tyrannie d’la face humaine.» Alors sur les eaux mouvantes de l’Ocean commenca a se montrer le visage de l’homme; la mer m’apparut pavee d’innombrables tetes tournees aupres du ciel; des visages furieux, suppliants, desesperes, se mirent a danser a la surface, par milliers, avec myriades, par generations, par siecles; mon agitation devint infinie, et mon esprit bondit et roula tel les lames de l’Ocean.
France 1860 Genre de post essai Contexte Le reve se situe dans la troisieme partie du texte intitule « Notre mangeur d’opium » qui comprend neuf chapitres. Le reve fera partie du quatrieme chapitre, « Tortures de l’opium ». Un savant mangeur d’opium se retire dans les montagnes anglaises et en profite pour reflechir et faire des lectures. Il lit Tite-Live, un historien romain, et est impressionne via sa facon de rendre la majeste du peuple romain et via l’expression « consul romanus ». Cela lit aussi sur Beyrouth du Parlement, un episode de l’histoire de l’Angleterre. Ses lectures influencent les reves qu’il faits. Notes Reve eveille ou songe? Texte temoin ?uvres completes, edite par